LA RUSSIE AIDERA LES COMPAGNIES ÉTRANGÈRES A CONTOURNER LES SANCTIONS
Les autorités russes ont trouvé un moyen de permettre aux entreprises étrangères de contourner les sanctions tout en les protégeant des changements législatifs.
Une entreprise étrangère peut-elle contourner les sanctions et lancer, en Russie, la production de produits interdits à l’importation depuis les pays étrangers ? Désormais, la réponse est oui. Le nouveau type de contrat correspondant – Contrat d’investissement spécial (SPIK) – a été élaboré à la mi-2015. Il a été testé par plusieurs entreprises russes dans les régions, mais les entreprises étrangères en ont également fait la demande.
Le fabricant automobile Mazda Sollers est le premier investisseur étranger qui signera un SPIK. La compagnie lancera une usine de moteurs à Vladivostok, dans l’Extrême-Orient russe, avec une capacité de 50 000 unités par an. Les investissements s’élèveront à 27,5 millions d’euros (2 milliards de roubles). Leur deuxième projet porte sur l’assemblage de nouveaux modèles de voitures. Le contrat s’étendra jusqu’en 2023.
Le fabricant allemand de machines agricoles Claas est le deuxième sur la liste des prétendants au contrat. Les investissements sont estimés à 10 millions d’euros (800 millions de roubles) sur dix ans. Pour le moment, la compagnie est au stade des négociations sur les garanties et les préférences dont elle souhaite bénéficier.
Le Fonds de développement de l’industrie (opérateur de la signature des SPIK) nous a expliqué que plus de 100 autres demandes étaient en cours d’étude. Il s’agit, notamment, de la compagnie tchèque Kokosvit qui souhaite lancer la production de machines-outils pour le travail des métaux dans l’oblast de Rostov, ainsi que de la compagnie Volkswagen et du fabricant de machines-outils DMG MORI.
Sur quoi portent les garanties du contrat ?
Le contrat a été créé pour ceux qui souhaitent lancer en Russie des productions industrielles n’ayant pas d’équivalents ou relevant des domaines prioritaires. Chaque contrat est individualisé. Ainsi, il offre la possibilité de créer les conditions exclusives dont la compagnie a besoin pour réaliser son projet. Plus le niveau de localisation est élevé, plus l’investisseur peut prétendre à des conditions préférentielles.
Le SPIK ne s’adresse pas à tout le monde
Cependant, le nouveau type de contrat ne permettra pas toujours de contourner les sanctions. Le Fonds de développement de l’industrie souligne que le SPIK ne peut être signé qu’avec les représentants de certains secteurs : constructions mécaniques, machines-outils et instruments, métallurgie, chimie, industrie pharmaceutique, biotechnologies, médecine, industrie légère, industrie forestière, cellulose, papier et transformation du bois, électronique, aviation, construction navale, industrie des communications, radio-électronique.
Ainsi, les entreprises étrangères qui ont cessé d’exporter des biens et des technologies à double usage en Russie à cause des sanctions pourront contourner l’interdiction, alors que les fabricants de biens alimentaires ne le pourront pas. Les conditions préférentielles ne s’appliquent pas à l’industrie alimentaire, ni aux industries minières, surtout le pétrole et le gaz.
Expérience mondiale
En Hongrie, le principal objectif de ce contrat était d’augmenter le taux d’emploi médian et le taux de création d’entreprises commerciales dans les régions à fort taux de chômage. En contrepartie, l’Etat propose un plan individuel d’imposition avec d’importants allègements. Cela a permis à la Hongrie de se classer première parmi les pays d’Europe centrale et orientale en volume d’investissements étrangers par tête d’habitant.
En Chine, cet instrument a permis de stimuler les exportations. L’Etat propose des incitations fiscales et des conditions préférentielles de crédit. En outre, les entreprises sont exemptées de subventions pour leurs employés et ouvriers. Ces préférences ont rencontré un tel succès auprès des entrepreneurs que le montant des investissements a été multiplié par 10 en sept ans (de 1991 à 1998) pour passer de $4,4 milliards à $45,5 milliards.
Anna Koutchma
Photo: Vladivostok, Russie, 16 février 2015. Assemblage d’une Mazda 6 à l’usine Mazda Sollers. Crédit : Yuri Smityuk/TASS